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5 minutes avec Hélène Jacqz

Hélène Jacqz est une peintre française et lauréate de nombreux prix, dont les prix Fullbright et Rubinstein. Elle aime peindre à grande échelle. Dans une toile d’Hélène Jacqz, comme dans une improvisation de jazz, tout se joue dans l’instant. Tout est une question de tempo. C’est toujours le jeu du quitte ou double, Quitte, ce ne serait qu’une trace de peinture sans signification. Un son neutre, sans éclat, sans écho et sans vibrato. Double, c’est gagné. C’est un envol, un jaillissement, une floraison : un geste large qui propulse le regard d’un angle à l’autre du tableau.

Découvrez cette artiste solaire dans cet entretien exclusif avec Singulart.

Quand avez-vous choisi de devenir artiste ?

Deux ans après le début d’un entraînement intensif en école de danse, mon corps, un compagnon fidèle jusque-là, m’a lâché. J’avais 20 ans, cela a été violent, douloureux, puis instructif.

La peinture était un peu une histoire familiale. Mon père avait commencé à dessiner vers l’âge de 35 ans dans un Sanatorium à la suite d’une tuberculose. J’ai toujours vu mon père peindre et dessiner. C’est pourquoi suite à cet accident, comme je ne pouvais plus bouger comme avant, j’ai naturellement commencé à fabriquer des objets avec mes mains, puis à dessiner. Ensuite, j’ai suivi des cours du soir de dessin aux ateliers de la ville de Paris.

Le plaisir éprouvé ainsi que la rencontre avec moi-même, m’ont donné l’envie de continuer. À la fin de cette année-là, j’ai obtenu l’entrée au concours de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts (ENSBA) et celui de l’Ecole Nationale des Arts Décoratifs de Paris. Sans aucun dilemme, j’ai choisi de rentrer à l’ENSBA car entre-temps, j’avais décidé de me consacrer pleinement à la peinture.

Hélène Jacqz, Géométrie évasive (2018)

Pouvez-vous nous parler de vos influences artistiques et des artistes qui vous inspirent ?

Je n’avais pas beaucoup de bagages à mon arrivée à l’ENSBA. Nous dessinions beaucoup de modèles. Parallèlement, dans les musées, carnet de croquis en mains, j’essayais de trouver d’où venaient la force et l’émotion des œuvres qui me touchaient.

J’ai d’abord aimé Manet et Corot pour la lumière, Matisse pour la couleur, la clarté du dessin. Lautrec pour sa justesse et son humanité. Les portraits du Fayoum pour leur simplicité. Sassetta (Sienne 1400-1450) pour la ferveur et la sincérité, Van Gogh, inclassable, si intense. Michel- Ange, quelle puissance! A cette époque, j’ai aussi eu la chance de côtoyer de près la collection de Jean Polak (Galerie Ariel). Les peintres du mouvement COBRA, Jorn, Appel, Alechinsky m’ont appris sur l’inconscient dans l’art du XXe siècle et à l’utilisation des couleurs pures. 

C’est aux Etats-Unis, où je suis restée presque cinq ans (grâce au soutien de deux bourses d’étude après mon diplôme de l’ENSBA), que ma peinture a pris un tournant. Avant cette période américaine, mon amour pour les Nabis était ma référence. La rencontre physique avec la peinture de Pollock, Cy Twombly ou Basquiat, tout comme la rencontre avec le jazz et l’improvisation, m’ont donné l’élan et la force pour un nouveau départ.

Préférez-vous travailler seule ou en collaboration avec d’autres artistes ?

Côté création, l’essentiel de mon travail se fait dans la solitude de l’atelier. J’aime être seule car mon travail est intime et sans concession ; mais je ne suis pas contre le travail en équipe sur des projets spécifiques.

Photo : Woytek Konarzewski

Pouvez-vous nous parler d’un projet sur lequel vous travaillez actuellement ?

En ce moment, j’ai de nouvelles collaborations professionnelles et marchandes qui se mettent en place. Je serai invitée dans une résidence pour réaliser des estampes avec un atelier d’édition de gravures contemporaines dans l’Est de la France.

Je suis également en pourparlers avec un éditeur de tapis contemporain. Certaines de mes œuvres récentes se prêteraient bien à ce type de supports. Dans cet esprit, j’ai d’ailleurs démarré récemment une collaboration avec un designer pour un projet de mobilier contemporain. Coté publication, je suis très heureuse de collaborer avec Saisons de Culture (association culturelle franco-polonaise à Paris). Nous travaillons en ce moment à l’édition de 3 catalogues retraçant mon travail de 2014 à 2019.

Que feriez-vous dans la vie si vous n’étiez pas devenue une artiste ?

À vrai dire, je ne me pose jamais cette question, j’ai choisi la peinture car c’est un engagement de vie qui me permet de vivre en accord avec moi-même, m’oblige à me dépasser et à avancer constamment, tout en étant seule à décider de mes choix.

Hélène Jacqz, Alterité (2016)

Y a-t-il d’autres artistes présentés sur Singulart dont le travail vous inspire?

Il y a beaucoup d’œuvres sur Singulart. Votre question m’a fait explorer votre galerie en ligne plus qu’avant. Voici quelques artistes que j’ai remarqué : Gary Komarin, Seung Yoon Choi, Las Animas, Maria Argüelles, Ibrahima Cissé Déb’s, Kees Ouwens, Monica Mariniello, Michael Rofka et Yongsun Jang

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes artistes qui débutent ?

Si vous ne pouvez rien faire d’autre, allez-y, et n’abandonnez jamais vos rêves !

Photo : Woytek Konarzewski

Merci Hélène ! Ne manquez pas les autres œuvres d’art sur sa page Singulart !